Altkirch : « On leur a prouvé qu’on savait faire »

Crédit photo Nicolas Mabyle - DirectVelo

Crédit photo Nicolas Mabyle - DirectVelo

Antoine Geyer et son équipe partaient dans l'inconnu. Pour la première fois, ils organisaient une course cycliste et ils ont commencé fort avec la tenue du Championnat de France de l’Avenir, qui a eu lieu à Altkirch (Haut-Rhin) la semaine passée. L’évènement a été une réussite sur le plan sportif, avec un parcours qui a permis aux concurrents d’offrir au public des courses très disputées. Mais ce Championnat a surtout séduit les passionnés de cyclisme plus que les locaux. Une situation que regrette le président de Sundgau Sport Organisation mais qui ne l’empêche pas de postuler pour recevoir le Championnat de France Élite 2026. Antoine Geyer dresse le bilan pour DirectVelo.

DirectVelo : Quel sentiment domine à l’issue de ce Championnat de France de l’Avenir ?
Antoine Geyer : Il y a surtout la satisfaction du travail de tous les bénévoles. C’est ce qui m’impressionne le plus. Arriver à avoir 200 bénévoles tous les jours, dont la moitié sont des signaleurs, c’est juste incroyable. Les conditions météo ont été bonnes mais ce n’est pas facile de rester aussi longtemps en plein soleil. Le comité d'organisation a également fait un gros travail. On est quatre-cinq à préparer à fond cet événement depuis septembre 2023. C’est presque un record. En quelques mois, on a réussi à monter une organisation ++. On n’a pas voulu faire comme les autres, on a fait un Championnat de France comme nous le voulions.

C'est-à-dire ?
Au niveau des infrastructures, on a mis en place une grosse ligne d’arrivée avec beaucoup de partenaires. On voit déjà plus loin en espérant le Championnat de France Élites en 2026. Le but était de convaincre les collectivités et les partenaires privés. On voulait montrer qu’on savait faire pour l’avenir. C’est la première fois que certains camions étaient au Championnat de France de l’Avenir. Ce sont de petits détails qui ont leur importance comme l’écran géant. On a essayé de faire aussi une mini fan-zone dans le Roggenberg. Il y avait aussi le drone qui permettait d’avoir des images extraordinaires. Le tout avec un coût raisonnable.

As-tu été suivi comme tu le voulais ?
On a réussi à fédérer toutes les collectivités, surtout du sud Alsace, la Région Grand Est, la Collectivité Européenne d’Alsace, la ville d’Altkirch, la Communauté de Communes Sundgau, Saint-Louis Agglomération et Mulhouse Agglomération. Ces deux dernières nous suivent parce qu’on a proposé un projet à long terme, avec le Championnat de France Élites.

« BEAUCOUP DE FAUSSES VÉRITÉS SUR LES RÉSEAUX »

Il y a eu des critiques des gens du coin sur le fait qu’ils ne pouvaient pas circuler autour d’Altkirch…
Ce n’était pourtant pas le cas. On a beaucoup communiqué. Les gens râlent toujours mais on a fait du mieux qu’on a pu, notamment pour minimiser les impacts pour la ville. Ce qui est un peu dommage, c’est de voir dans la presse que les commerçants ne s’y retrouvent pas. Nous non plus, en tant que comité d’organisation, on ne s’y retrouve pas. On retrouve beaucoup de fausses vérités sur les réseaux sociaux.

Comme lesquelles ?
Il a été dit que la ville était bloquée, qu’il fallait l’éviter, qu’il n’y avait pas de parkings alors que c’est faux. On a travaillé pendant des mois avec la mairie pour encaisser une forte affluence. Tout a été mis en place, avec des parkings et une navette électrique pour faire quelque chose de propre et de bien, mais le résultat n’est pas là. C’est peut-être de notre faute, on s’est peut-être trop concentré sur les réseaux sociaux, mais c’était aussi pour des raisons budgétaires car une telle communication ne coûte rien. Imprimer des affiches, ça a un coût financier et écologique. On aurait peut-être dû passer aussi par une communication plus traditionnelle pour toucher plus de monde. Il y a peut-être un ajustement à faire, mais il ne faut pas oublier que c’est la première fois qu’on organisait une course de vélo.

Comment est né ce projet ?
Il y a trois ans, au Grand Prix de Wittenheim, quand je courais encore et avant de passer au triathlon, un journaliste m’a dit qu’on avait trois coureurs professionnels alsaciens, Axel Zingle, Hugo Hofstetter et Antoine Raugel, et que les deux premiers pouvaient remporter un Championnat de France. C’était au mois de mars. En septembre, je ne sais pas pourquoi, j’appelle mon père et je lui ai dit qu’il nous fallait X centaines de milliers d’euros pour organiser un Championnat de France pro. Il m’a dit que j’étais complètement taré. Mon pote et entraîneur Alexis Brodbeck m’a donné le numéro d’Alexandre Fourez pour lui demander comment faire (rires). Alexandre m’a d’abord pris pour un fou : “je ne vous connais pas, vous n’avez jamais rien organisé, ce n’est pas comme ça que ça marche. Par contre, avant d’organiser pour les pros, on peut vous proposer d'organiser en 2024 le Championnat de France de l’Avenir et si ça se passe bien, vous aurez priorité pour 2026”. C’est le deal que j’ai aujourd’hui avec la FFC, en fonction du financier bien sûr. 

« LE SOUTIEN DE LA VILLE A ÉTÉ TRÈS IMPORTANT »

T’es-tu parfois demandé pourquoi tu t’étais lancé là-dedans ?
Plus d’une fois, oui. En fait, à chaque fois qu’on était face à des gens qui nous exposaient un tas de problèmes mais ne proposaient aucune solution. Le soutien de la ville d’Altkirch a été très important. Les élus nous ont aidés à trouver des solutions et on en a presque toujours trouvé. Après sur le terrain, c’est différent. Mercredi, au lieu de fermer la route à 12h30, on l’a fermée à 12h20 et c’était la fin du monde pour tout le monde. Mais quand le président du jury me demande de fermer la route parce qu’il y a trop de voitures sur la ligne de départ, je le fais. Ces dernières semaines, la seule chose qui m’intéressait, c’était la sécurité des coureurs, devant le budget, la météo… Et tout s’est bien passé à ce niveau.

Les retours des gens du vélo sont très positifs… 
Oui, on les entend et ça fait du bien. On entend beaucoup les choses négatives et ce sont ces mêmes personnes qui nous disent qu'il ne se passe jamais rien. Mais aujourd'hui 90% des gens qui étaient au bord de la route viennent d’autres régions.

Tu le regrettes forcément…
Je me demande pourquoi il n’y avait pas plus de gens du territoire sur le bord des routes. Pourquoi les Altkirchois n’étaient pas là ? Je ne les incrimine pas, mais on entend beaucoup qu’il faut faire vivre la ville et les commerces. On a tout mis en place pour le faire, avec des moyens financiers conséquents. On a mis en place des choses attractives qui n’étaient pas obligatoires comme un écran en centre-ville et derrière, il ne se passe rien. Est-ce que ça vient du gros week-end avec un pont ? C’est peut-être une partie de la réponse parce que nous aussi, on a eu du mal à trouver des bénévoles. On n'a peut-être pas mis non plus en place toute la communication nécessaire.

« DE SUPER ÉVÉNEMENTS QUI DOIVENT ÊTRE FÉDÉRATEURS »

Comment imagines-tu la suite ?
J’ai toujours envie d’organiser un Championnat de France Élite, mais il faut que tout le monde sorte de sa bulle. Ce sont de super événements qui doivent être fédérateurs. Le vélo est le dernier sport au monde gratuit. On a réfléchi à faire une entrée payante surtout pour 2026, comme pour la piste ou le cyclo-cross, mais aujourd’hui l’idée première est que le vélo est un sport populaire. Christian Prudhomme l’a rappelé sur le dernier Tour de France et je pense qu’il a raison. Cependant, on arrive à la limite d’un système. En 2026, il faudra ajouter les frais de production de la télévision.

Ça sera 2026 ou rien ?
Quand je m’engage dans quelque chose, je respecte mes engagements. Il faudra que la FFC fasse de même. Je pense qu’on leur a prouvé qu’on savait faire. On va se retrouver dans les prochaines semaines avec les collectivités. Elles ont également vu ce qu’on pouvait faire.

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